En entreprise, en plus de gérer la dimension professionnelle, je me devais de gérer la dimension humaine de tout mon environnement. …

Mais, au final, j’ai fini par m’adapter. Entre temps, je me suis mariée, j’ai eu des enfants. Le problème fondamental, quand on est une femme, mariée, avec des enfants, et que l’on travaille, c’est que l’on n’est jamais assez préparée, psychologiquement, à faire face à toutes ses filiales de notre propre vie : Notre relation avec Dieu , nous même, notre époux, nos enfants, notre couple, notre maison, notre foyer, notre travail, nos parents, notre propre famille, celle notre mari, , et hypothétiquement, nos ami(es). Mais on aura au moins réussi à faire plaisir à nos parents: toutes les femmes finissent à tous les coups PDG, Présidente Directrice Générale de leur propre existence….En y réfléchissant, je pense alors à…

  • Moi, Femme, avec mes cycles hormonaux qui ont une incidence incontrôlable et très souvent négative sur mes humeurs, ma forme physique et intellectuelle, évoluant dans un milieu professionnel, constamment sous pression, stressée à « temps plein » entre les humeurs des uns et des autres, les coups bas, les mauvaises langues, les égocentriques, les courtisans, les opportunistes, les arrivistes, les méchants, les menteurs et les hypocrites. Femme, qui est supposée cuisiner, dresser la table, prendre soin de tout, exactement tout, êtres vivants et objets inclus, dans la maison. Femme doit s’occuper de ce qui suit :
  • Le mari, composé de petites caprices, de temps en temps, de sauts d’humeurs, de sursauts d’égo, mais surtout, de ce besoin irrépressible d’être pouponné, chouchouté exactement, comme « Avant », quand il était célibataire. Le mari, caractérisé par cette habitude révoltante, qui est d’allonger ses jambes, télécommande à la main, engagé dans un zapping effréné et las, tandis que la marmite « Boue » et que la Femme, qui a passé EXACTEMENT la même journée que lui, donc, théoriquement aussi ou même beaucoup plus éreintée que lui, essaie de se démêler entre les frites, le poulet sur les braises, la salade, le biberon de Bébé, le diner de l’ainée et ensuite, cherche à se soustraire des caresses suggestives du mari, quand elle commence à se plonger dans un sommeil qu’elle aurait souhaité réparateur.

  • Les enfants : Ces petits bonheurs très souvent porteurs de petites douleurs. Des bobos qui ont le don de nous garder éveillé toute une nuit, alors que nous devons aller TRAVAILLER, Au BUREAU. Ces enfants, anges innocents, ces fournisseurs officiels de bonheur et d’amour, qui nous rendent la vie tellement agréable, ne devront absolument manquer de rien, sur le plan affectif, matériel et psychologique. Il faut donc assurer un suivi étroit à l’école, s’assurer qu’ils font de bons résultats, ont de bonnes fréquentations, et un comportement irréprochable vis-à-vis de leurs instituteurs, et de tout le monde, d’ailleurs.
  • La maison : Cet espace qui se doit d’être un « Haaavre de paix », un foyer chaleureux. Aucune tache sur les murs et carreaux, aucune poussière, aucune toile d’araignée, n’est tolérée. Tout doit être nickel, entre les draps, les nappes de table, les rideaux, la vaisselle, les toilettes, les chambres, le salon. La ration alimentaire doit être à jour, les courses faites à temps, last but not least, les effluves de gongo, le détail qui tue.
    Les parents : Nos chers parents, ceux qui nous ont donné la vie, nous ont éduqués, et qui, après nous avoir mis la pression pour qu’on se marie, se plaignent de leur solitude, et du fait qu’on ne vienne pas les voir tous les jours. Les mamans, elles, se transforment en machine à sous, mais dans le sens inverse. Entre les petits problèmes, le crédit de téléphone et les Khews, le compte bancaire commence à s’essouffler. Mais, en bonne croyante, on accepte tout. Les parents, c’est sacré ! On doit ensuite jongler entre la gestion des humeurs de l’Homme, les pleurs des « Mômes », et le chantage affectif de la « Maman ».
    Il y a également la famille du cher et tendre époux qui nous a adopté, et envers qui nous avons des obligations, les mêmes que nous avons envers notre propre famille, le travail, qui constitue notre gagne-pain, les « Cassage de bois ou khar matt » qui nous assurent un revenu supplémentaire et complémentaire, on se demande si on ne se dédouble pas.

 

Décidément ! Avec du recul, on se rend compte qu’on devrait décerner le prix Nobel du courage, de l’abnégation, de l’héroïsme, de la sensibilité et de l’humilité à nous, les femmes d’aujourd’hui, nous les femmes, qui, en plus de gérer toutes filiales de notre existence, continuons à rester humaines, sensibles, tendres et fortes.

« Maman ! », la voix de ma fille me fait émerger de mes pensées. Je les regarde, elle et ses deux petits frères, et j’ai mal. La vue du petit dernier, qui était souffrant, au moment de mon accident, me déchire le cœur. Ai-je vraiment le droit de leur faire subir cela ?

Ai-je vraiment le droit de les priver d’une mère, parce que j’ai été formatée, formée pour être « Indépendante ». Ai-je le droit de les priver d’une mère parce que je veux « Réussir », être « quelqu’un », alors que pour eux, je suis pourtant « quelqu’un ». Ma quête de réussite, mon ambition, que je le veuille ou non, passeront par le sacrifice de ces petits qui n’ont pourtant rien demandé. Je leur dois tout mon temps : Mon temps pour prendre soin d’eux, mon temps pour les éduquer, mon temps pour les rectifier quand ils sont dans l’erreur, mon temps pour les couvrir d’amour, de protection, d’affection, de tendresse. Mais, au lieu de cela, je leur trouve une « Nounou », qui, que je le veuille ou non, me remplacera, d’une certaine manière. Une nounou, qui me raconte la dernière anecdote, la dernière petite phrase de mon fils, la dernière « phase » de ma fille. Je l’écoute, le cœur comblé, oui, mon enfant fait des progrès, mais, en y réfléchissant, je suis triste. Triste, parce que je n’ai pas été là, à leur premier pas, à leur premier mot. Le soir, je ne les borde pas, parce que je suis au travail. En 24H, je ne les vois que durant 30 minutes en semaine. Les week-ends, j’essaie de me rattraper. J’essaie de me réconforter, en me disant : « Tu le fais pour leur offrir un avenir », mais une petite voix me dit « A quel prix ? Le jeu en vaut-il la chandelle ? L’avenir, la vie des enfants, le temps précieux, la présence qu’on leur offre, vaut-elle ce rêve qu’on leur promet ? ». D’un coup, mes convictions de célibataire active se brisent, tel un château de sable : Oui, si Dieu a assigné le rôle de femme au foyer, c’était pour une bonne raison. Non, l’éducation idéale de nos enfants passera forcément par le temps qu’on leur accordera. Eduquer des enfants est un travail à plein temps. Du coup, j’éprouve un grand respect pour toutes ces mères, qui ont fait le choix de rester chez elles, pour s’occuper, entièrement, de leurs enfants. Non, il n’y a pas de plus beau métier.

Oui, je suis passée à côté de la mort, mais non, il ne faut pas que je passe à côté de ma vie….

Malheureusement, le revers de la médaille n’est pas très reluisant….

Indépendance rime avec sécurité, pour presque toutes les femmes actives….

La solution qui s’impose : Trouver le parfait équilibre, offrir à notre foyer, et à toutes ces filiales de notre existence ce qui leur est dû, et penser à ce que ma sœur m’a dit, une fois « Ton entreprise peut toujours te remplacer. Tes enfants, eux, ne pourront jamais avoir une autre mère »….

Et je repense à mon employeur …Ma place n’est pas garantie…combien de fois a t-on profité d’une situation semblable à la mienne pour  »mettre » quelqu’un au  »congélateur »? Et la visite de ma chef me le confirme, avec un sourire, le même que celui de tous les jours, elle m’annonce que collègue Ines (celle qui a battu le record des coups foireux à mon encontre), s’occupera de mon  »Back up »…La même qui convoitait le poste qui m’était finalement revenu, suite à l’approbation du DG…La même qui va déjeuner tous les midi avec ma chef…

Bref, advienne que pourra, chez eux, j’aurais toujours un  »Back-up », dans mon foyer, jamais, personne ne pourra me  »Back-uper »….

Oui, je suis passée à côté de la mort, mais non, il ne faut pas que je passe à côté de ma vie….

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6 Responses

  1. Maïmouna dit :

    Article génial Rabia ! Je l’attendais avec impatience. Je ne suis pas déçue.
    Bonne continuation.
    Je suis maman qui travaille – ingénieure- Et blogueuse en même temps et il est vrai que gérer les différentes sphères de notre vie n’est pas facile. Donc je me retrouve parfaitement dans ce que tu dis.
    Bonne continuation!

    • rabia dit :

      Bonsoir Maimouna, Ca fait plaisir de savoir que cette chronique vous ait parlé…Ce serait intéressant de partager vote vécu avec nous en tant que femme (im)parfaite. Des anecdotes, par exemple? Faites moi un mail sur rabiadiallo@gmail.com et je me ferai un plaisir de le partager. Prenez soin de vous!

  2. Anonyme dit :

    TOP TOP TOP j’adore
    Je me reconnais tellement dans ton récit!
    Merci pour cette fin, cela permet de revenir un peu à la réalité (même si d’ici 1h l’engrenage reprendra le dessus sur la prise de conscience)!
    Et c’est encore plus vrai quand on est mère célibataire, certes on n’a pas le poids du chéri qui attend le soir que le repas soit prêt, mais la culpabilité de les priver de père rajoutée à toute la responsabilité qui repose que sur nos épaules nous fait oublier que nos enfants ont plus besoin d’amour que de jouets ou d’activités extrascolaires!
    Merci encore et continue s’il te plaît

  3. Anonyme dit :

    Bonsoir Rabia, je me retrouve tellement dans ce que tu dis! Mariee et mere de 3 enfants Alhamdoulilah mais aussi occupant un poste dit de responsable dans mon enterprise. Il ny a pas un jour ou je ne pose lequation de lequilibre boulot-enfants-mari-maison-religion-famille. Est ce que cest ta propre histoire? Si oui jaimerai vraiment echanger avec toi. Merci encore

  4. Aminata dit :

    Bonjour Rabia,
    C’est avec joie et tristesse par moments que je découvre vos chroniques si réels et si naturels,
    écrits avec un style à la fois soutenu et décontracté.
    On serait amener même en vous lisant à nous poser la question à savoir est-ce que c’est pas mon histoire!?
    Toutes nos félicitations et nos encouragements.

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